Hors d’atteinte, Frédéric Couderc

Hors d’atteinte

Frédéric Couderc

Editions Les Escales

Quatrième de couverture

Un roman haletant mêlant enquête intimiste et historique, d’où surgit de l’oubli Horst Schumann, un criminel nazi longtemps traqué mais jamais condamné.

Hambourg, été 1947. Le jeune Viktor Breitner arpente sa ville dévastée. Un jour, il croise Nina, une rescapée des camps dont il tombe éperdument amoureux. Elle disparaît, son absence va le hanter pour toujours, autant que le fantôme de sa soeur Vera, morte au début de la guerre.


Soixante-dix ans plus tard, Viktor s’évanouit à son tour. En se lançant à sa recherche, son petit-fils Paul découvre avec effroi que celui-ci est mystérieusement lié à un doktor SS d’Auschwitz semblable à Mengele : Horst Schumann. Paul est un écrivain à succès, l’histoire de son grand-père, c’est le genre de pépite dont rêvent les romanciers. Mais il redoute par-dessus tout la banalisation de la Shoah, et sa soif de vérité le mènera jusqu’aux plaines d’Afrique, dans une quête familiale aussi lourde que complexe.

Mon avis

Hambourg, 2018. Tous les samedis, Paul Breitner déjeune avec son grand-père. Or, un midi de l’été 2018, Viktor est absent. En inspectant sa maison, son petit-fils réalise qu’il est parti depuis une quinzaine d’heures. Il s’affole et mobilise des moyens pour le retrouver. Le nonagénaire est découvert au phare de Witterbergen, en transe. Il cache une lettre, avec un tampon new-yorkais. Celle-ci a provoqué un choc émotionnel, puisqu’à partir de ce jour, il reste muet.

Quelques jours après cette fugue, un inspecteur appelle Paul pour prendre des nouvelles de Viktor. Lorsqu’il apprend que ce dernier est toujours aphasique, sa réponse est un coup de tonnerre : « Vers la fin, j’ai observé la même chose chez son voisin SS. Un de ces médecins d’Auschwitz, dans le genre Mengele. » (p. 90). Il indique que celui-ci est décédé tranquillement dans son lit, en 1983. Il s’appelait Horst Schumann. Oublié par la justice, ce monstre a réalisé des expériences ignobles sur « un millier de cobayes. » (p. 92) Stérilisation de masse, ablation des testicules et des ovaires, rayons X, sélection à l’arrivée des camps et, comme Paul le découvrira par la suite, il a eu un rôle prédominant dans le programme Aktion T4, qu’il qualifiait de « mort miséricordieuse ». A la fin de sa vie, il paraissait avoir peur. Par ses révélations, le policier semble le relier à Viktor. Paul lui répond que ce dernier n’est pas nazi, mais il perçoit qu’une boîte de Pandore est ouverte.

Paul est écrivain. Il décide de se documenter sur les crimes de Horst Schumann et d’enquêter sur le passé de Viktor. Il sent qu’il risque de se confronter à des révélations horribles sur son aïeul, mais il ne peut oublier certaines accusations de l’inspecteur. Il décrit ses craintes, ses découvertes, ses doutes, sa manière de procéder, ses interrogations : il partage, avec nous, son travail de recherche et d’écriture. J’ai été passionnée par cette immersion. Dans un avant-propos, l’auteur précise que le livre est une fiction. « Les choses ont pu se dérouler ainsi, ou (un peu) autrement. » (p. 10) Paul détaille cette frontière entre la réalité et l’interprétation et celle entre les faits réels et ceux imaginés. J’ai été émue par la parole donnée à des rescapés. J’ai, aussi, aimé que ses sources soient intégrées dans le récit. Certains livres de ma pile à lire sont cités, j’en ai ajouté d’autres dans ma liste d’envies et j’ai reconnu certaines de mes lectures. Paul précise que sa personnalité évoque celle de mon auteur préféré, Luca Di Fulvio : il ne pouvait que m’être sympathique.

Hors d’atteinte, Frédéric Couderc

Les démarches de Paul sont entrecoupées par la voix de Viktor. Celui-ci relate sa rencontre, au milieu des ruines, en 1947, avec Nina, une jeune fille qu’il n’oubliera jamais et qu’il a, pourtant, aidé à partir loin de lui. Il entretient, également, le souvenir de sa sœur Véra. Son chagrin est incommensurable lorsqu’il découvre les véritables circonstances de son décès. Ce moment de vérité marque le basculement de son existence. Mes mots sont impuissants pour qualifier sa colère, sa haine et son effroi qui s’ajoutent à sa peine, cependant, Frédéric Couderc transmet, parfaitement, les sentiments de Viktor, ainsi que son désir de justice. J’ai été bouleversée par son authenticité et par la force de son témoignage. Je me suis, énormément, attachée à lui. Aussi, j’ai partagé les inquiétudes et les questionnements de son petit-fils.

Hors d’atteinte est un roman très documenté dans lequel la reconnaissance des victimes est aussi essentielle que la condamnation des monstres. C’est un devoir de mémoire extrêmement respectueux, développé et bouleversant. C’est un énorme coup de cœur pour moi.

Je remercie sincèrement Anne des Éditions Les Escales pour ce service presse.

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