Pour l’amour de Marie, Michel Verrier

Pour l’amour de Marie

Michel Verrier

Editions de Borée

Quatrième de couverture

Ouvrière dans l’industrie textile et fille de vignerons, Marie n’aurait jamais cru qu’un ingénieur puisse un jour tomber amoureux d’elle. Et pourtant, elle va bien épouser Thomas Burger, ingénieur alsacien dépêché dans l’usine où travaille la jeune femme. Voici venu le temps de quitter ses parents et sa sœur pour partir s’installer dans la contrée natale de Thomas, malgré ses craintes bien légitimes. La naissance de Jeanne, leur fille, viendra sceller leur union dans le bonheur. Pour un temps seulement, puisque bientôt l’Alsace se voit devenir allemande, contrainte et forcée, sous le joug du Reich. Marie va alors repartir avec sa fille, chez ses parents, pour se mettre en sûreté. Quelques semaines seulement, qui deviendront des mois et des années, une interminable attente, sans nouvelles de Thomas.

Mon avis

Marie est fille de vignerons, dans le Beaujolais. Le propriétaire de l’exploitation de son père est, également, à la tête d’une entreprise de textile dans laquelle la jeune fille et sa sœur sont employées. C’est à son travail que Marie rencontre Thomas Burger, un ingénieur alsacien, venu former le personnel à un procédé de teinture qu’il a mis au point. Amoureux l’un de l’autre, ils se marient. Pierre Chevalier, le père de la mariée apprécie son gendre, mais il ne peut retenir ses larmes quand sa fille emménage en Alsace. Il sait qu’il la verra moins souvent. Le jour du printemps 1934, Marie donne naissance à une petite fille : Jeanne.

En ce début d’année 1934, les Alsaciens, qui sont frontaliers de l’Allemagne, s’inquiètent. Le pays voisin décide de ne plus payer les dommages de guerre et vit « dans l’espoir d’une revanche populaire pour laver l’affront qui lui avait été imposé par le traité de Versailles en juin 1919. » (p. 51). Hitler gagne du pouvoir et le Reich se militarise. Lorsque la guerre est déclarée, les Alsaciens comprennent qu’ils seront les premiers à être envahis. Au début du mois d’août 1939, la région devient une province allemande. Tous les symboles français sont alors interdits. De plus, les Germaniques imposent « l’expulsion des Juifs, des Tsiganes et des citoyens français arrivés en Alsace après 1918. » (p. 53) Marie risque d’être expulsée sans sa fille, qui est née en Alsace. Thomas convainc son épouse de partir, en zone libre, chez ses parents, avec Jeanne. Sans lui… car s’il quitte la région, il se retrouvera dans un camp, ainsi que ses parents. Comme de nombreux Français, le jeune couple est persuadé que la séparation ne durera que quelques semaines.

Hélas, pendant plusieurs années, les communications entre l’Alsace et le Beaujolais sont coupées. Plusieurs années pendant lesquelles Marie ne sait pas si son mari est encore vivant, s’il est en Alsace ou en Allemagne. Plusieurs années pendant lesquelles elle voit sa fille perdre son sourire, inquiète de ne pas avoir de nouvelles de son papa. Six ans d’angoisse : par les murmures qu’elle entend, Marie connaît le sort des Alsaciens, enrôlés de force dans l’armée de l’ennemi et envoyés en première ligne. La jeune femme prend des risques pour tenter d’avoir des réponses, certaines personnes se mettent en danger pour essayer de soulager sa peine. Malheureusement, pour beaucoup, elle est la femme d’un « boche », alors que lors de son mariage, Thomas avait la nationalité française. Dans son village natal, la Résistance s’organise et les collabos profitent de la guerre, pour régler leurs différends. Au moment de la Libération qui remplit les cœurs de joie, des Résistants de la dernière heure retournent leur veste et commettent le pire.

La famille de Thomas ne sait toujours pas ce qui est advenu de lui. Ce roman poignant montre la condition des Malgré-nous, ces hommes français, obligés de combattre contre leur pays. Il révèle de quelle manière ils étaient perçus, ainsi que leurs proches. Marie est la cible de médisances : des voisins qui ont perdu un proche, la tiennent pour responsable et sa famille risque d’être dénoncée pour n’importe quel motif fallacieux. Ce roman montre aussi comment la Résistance s’est organisée et de quelle manière elle était infiltrée. C’est aussi l’histoire de ces hommes et de ces femmes qui ont compris que si la population n’agissait pas, la Libération n’arriverait jamais. Ils ont préparé le terrain pour le débarquement, en affaiblissant l’occupant. Pour L’amour de Marie décrit, également, ce que chacun a fait pour survivre et que des actes résultent de la décision de choisir le moindre mal. Certains ont fait comme ils pouvaient, pour ne pas mettre leurs proches en danger. Enfin, dans les moments de liesse de la fin de la guerre, l’auteur montre que des Français se sont comportés de manière abjecte. Souvent, ce n’étaient pas ceux qui avaient été des héros pendant le conflit ; beaucoup de vrais Résistants étaient choqués par ces condamnations sans jugement.

J’ai eu un coup de cœur pour ce roman empli d’émotion et qui montre que l’Occupation n’était pas la même sur tout le territoire français, mais que, pourtant, tous souffraient. L’horreur prenait plusieurs formes. Je me suis énormément attachée aux familles Burger et Chevalier. Seront-elles réunies ?

Je remercie sincèrement Virginie des Éditions de Borée pour ce service presse.

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