Un long, si long après-midi, Inga Vesper

Un long, si long après-midi
Inga Vesper
Editions de La Martinière

Quatrième de couverture

« Hier, j’ai embrassé mon mari pour la dernière fois. Il ne le sait pas, bien sûr. Pas encore. »

Dans sa cuisine baignée de soleil californien, Joyce rêve à sa fenêtre. Elle est blanche, elle est riche. Son horizon de femme au foyer, pourtant, s’arrête aux haies bien taillées de son jardin. Ruby, elle, travaille comme femme de ménage chez Joyce et rêve de changer de vie. Mais en 1959, la société américaine n’a rien à offrir à une jeune fille noire et pauvre. Quand Joyce disparaît, le vernis des faux-semblants du rêve américain se craquelle. La lutte pour l’égalité des femmes et des afro-américains n’en est qu’à ses débuts, mais ces deux héroïnes bouleversantes font déjà entendre leur cri. Celui d’un espoir brûlant de liberté.

UN DES « MEILLEURS ROMANS DE 2021 » SELON LA PRESSE ANGLAISE (Stylist, The Guardian, Sunday Express)

Mon avis

Il fait chaud, très chaud, « c’est un jour pour les shorts » (p. 13). Ruby transpire dans son uniforme que les blanches, chez qui elle fait le ménage, la forcent à porter. Cela fait plus d’une heure qu’elle est dans le bus qui la mène de son quartier à celui des maisons cossues. Elle est en retard. Aujourd’hui, elle doit faire le ménage chez Mme Ingram, puis chez Mme Haney. Chez cette dernière, elle arrive 15 minutes après l’heure. Immédiatement, elle sent que la situation n’est pas normale : sa patronne n’est pas là et les enfants sont seuls. La plus âgée attend dans le jardin et le bébé pleure dans son lit. Lorsque Ruby pénètre dans la cuisine, elle découvre que la pièce est remplie de sang.

Ruby est suspectée : elle est la première sur les lieux, elle est pauvre et elle est noire. Pourtant, un inspecteur croit en son innocence et lui demande de l’aider à découvrir la vérité. Elle hésite, elle sait que sa couleur de peau la désigne comme coupable dans cette Amérique de la fin des années 50. Dans ce quartier résidentiel, seule Joyce Haney lui apporte de l’amitié. Pour les autres, elle n’est que la bonne qu’on malmène. Ruby, elle, supporte les remarques, car elle économise pour réaliser son rêve : aller à l’université. Elle sait que le chemin est semé d’embûches. Elle est très attachante : elle est partagée entre son envie d’aider Joyce, de savoir ce qui lui est arrivé et sa peur que sa condition entraîne. Elle est déchirée entre son idéal de vérité et la nécessité de ne pas se faire remarquer. Par expérience, hélas, elle sait que la justice n’est pas la même pour les noirs et les blancs. Elle est le personnage qui m’a le plus émue.

Joyce est-elle vivante ? Elle aussi, malgré sa vie aisée et sa belle maison, rêve de liberté, de s’échapper du carcan qui enferme les femmes à la maison. Elle a une passion secrète qu’elle ne peut réaliser. Elle est aussi une mère dévouée. Aussi, sa disparition est suspecte.

Le temps défile et Mick sait que les chances de retrouver Joyce en vie s’amenuisent. Cet inspecteur refuse de s’arrêter aux préjugés qui enlisent les enquêtes. Il a, même, parfois, tendance à oublier que les droits ne sont pas les mêmes pour tous, selon le lieu de naissance, le sexe ou les origines ethniques. Il commet beaucoup de maladresses, mais il est porté par le devoir. Il ne choisit pas la facilité : son enquête de voisinage fait valser les apparences. J’ai aimé qu’il se démarque de sa hiérarchie.

L’histoire est racontée par ces trois voix. Celle de Joyce décrit les évènements précédents, celle de Mick relate les investigations actuelles et celle de Ruby est le pont entre le passé et le présent. Ce sont trois sensibilités distinctes. Tous trois vivent dans des milieux différents et leurs vies sont entravées par des obstacles différents. L’union de leurs perceptions dresse le portrait social des Etats-Unis, alors que la ségrégation raciale est la norme pour ceux qui la subissent et pour ceux qui l’imposent. Au sujet des droits des femmes, il m’a semblé que l’auteure s’amusait avec les clichés, afin de montrer que la lutte était aussi à mener auprès des femmes.

J’ai adoré Un long, si long après-midi. J’ai aimé que l’aspect sociétal colore le suspense et le domine.

Je remercie sincèrement Babelio et les Éditions de la Martinière pour cette masse critique privilégiée.

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