La Maison aux chiens, Caroline Hussar

La Maison aux chiens

Caroline Hussar

Éditions Presses de la Cité

Collection Terres de France

Prix Jean Anglade du premier roman 2023.

C’est une maison perdue au coeur des plaines de l’Allier. Un étonnant capharnaüm, entouré de chenils. Geneviève et Francis y accueillent des enfants à l’histoire cabossée. Entre ce couple fruste et ces gamins, dans cette maisonnée organisée autour des chiens, l’amour se fraie son chemin.

Il y a Roman, que l’on a dû éloigner d’une famille déstabilisée, Nelson et Grégory, deux frères « difficiles »… Et Atalante, petite fille aussi sage que maladroite. Ces enfants qui arrivent avec leur passé, souvent traumatique, vont devoir apprendre à vivre ensemble. Et cohabiter avec la fille de leurs parents d’accueil, Angélique, qui peine à trouver sa place dans ce refuge… Un havre que le regard des autres, voisins, familles, services sociaux, va au fil du temps de plus en plus menacer.

« Dans cette meute de papier, chacun a sa place, même le chiot le plus fragile. Dans ce texte, chaque mot a aussi sa place. […] Lorsque vous le refermerez, vous en conserverez longtemps la douceur. » Lorraine Fouchet, préface

Roman d’une force rare, presque brute, à la tendresse rugueuse.

Caroline Hussar est avocate spécialisée dans la défense des victimes. Elle a grandi dans le Bourbonnais et vit au pied du Puy-de-Dôme.

Le père et la mère d’Atalante sont trop occupés à oublier leur vie et à remplir leur vie sociale pour prendre soin de leur enfant. Malgré leur désistement, ils sont des parents inquiets. La petite-fille n’a que dix ans : elle est trop jeune pour rester seule après l’école. Hélas, son ancienne nounou a annoncé son déménagement au dernier moment. Geneviève et Francis ont accepté de veiller sur Atalante. C’est ainsi qu’elle se retrouve dans une maison délabrée, pleine de bruits et d’odeurs, où cohabitent enfants et chiens. C’est un univers très éloigné du milieu petit-bourgeois dans lequel elle est élevée.

En effet, Geneviève et Francis travaillent pour les services sociaux, en tant que famille d’accueil. Chez eux, séjournent des enfants de tous les âges, avec des passés très différents, souvent traumatiques. J’ai éprouvé énormément de tendresse pour ces petits ; ils subissent les manquements des adultes. Au sein de cette bande hétéroclite, Atalante parvient à trouver sa place et reçoit l’affection qu’elle ne semble pas avoir chez elle. Elle est très proche de Roman. Ce garçon doux, qui exprime sa détresse dans les méfaits qu’il commet, m’a, particulièrement, touchée. Il est au cœur d’un terrible drame : responsable et victime à la fois.

J’ai, alors, réalisé que j’aimais intensément les parents nourriciers. Ils paraissent rustres, mais leur attitude prouve leur générosité. Ce ne sont pas des actes flamboyants, mais une présence discrète, bienveillante et respectueuse. Au début, j’ai pensé que je ne m’attacherais pas à eux, car j’ai des opinions très tranchées sur la passion de Francis (la chasse), mais elle n’est pas mise en avant, aussi cela n’a pas été rédhibitoire pour moi. Les faits sont énoncés et chaque lecteur les interprète avec sa sensibilité et ses opinions à ce sujet. Francis m’a bouleversée par son altruisme ; Geneviève par son dévouement. Le récit est empli d’émotion, dans laquelle la pudeur des sentiments cache une très grande humanité.

La Maison aux chiens est le lauréat 2023 du Prix Jean Anglade. Cette distinction récompense un premier roman, prônant des valeurs qui me sont chères, telles que la bienveillance, l’humanisme et l’universalité. J’ai la chance de faire partie du jury, qui était, cette année, présidé par Lorraine Fouchet. Dans sa préface, notre présidente partage la phrase qui l’a chamboulée. Voici un bout de celle qui s’est gravée dans mon cœur : « on se souvient toujours moins de celle qui remplissait l’écuelle que de celui avec qui on la partageait. » (p. 219). Lors de ma première lecture, l’histoire a laissé une forte empreinte dans ma mémoire et dans mon cœur. Avant d’écrire ma chronique, je l’ai relue, dans son format édité et mon coup de cœur s’est confirmé. J’espère que vous aurez envie de le lire : je l’aime tant.

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