Danse Néomaye, danse !, Corine Valade

Danse Néomaye, danse !

Corine Valade

Éditions de Borée

Collection Terres d’écriture

Présentation de l’éditeur

Le 6 juin 44, des centaines d’Afro-américains débarquent sur les plages de Normandie. Willie est un de ces hommes. De Berlin à La Rochelle puis au camp américain d’Aigrefeuille d’Aunis, il découvre des villes exsangues où tout est à reconstruire. Pianiste hors pair, la musique est son refuge.

Maurice est Creusois. Maquisard, il est enrôlé au 78e Régiment d’infanterie. En 1945, il quitte sa région pour libérer le dernier bastion Allemand de La Rochelle. C’est avec soulagement qu’il laisse derrière lui la ferme familiale.

Rochelaise, Néomaye est sage-femme. Prise au piège dans la poche de Royan en 1945, elle est une des rares survivantes du bombardement allié. De retour à la Rochelle, elle semble avoir perdu pied et tous l’appellent « La Tabayot » , la folle. L’arrivée massive de milliers d’Américains sur le port de La Pallice va bousculer son mode de vie tout comme celui des Charentais.

Mon avis

Willie est rattaché « au 320e VLA, Very Low Altitude, un régiment de ballons anti-aérien de très basse altitude, composé d’Afro-Américains. » (p. 18) Il participe au Débarquement du 6 juin 1944, quand un ballon explose en plein vol. Willie et ses camarades n’ont que le temps de s’extraire. Ils ne devaient pas prendre part au combat, pourtant, ils se distinguent par leur courage. Mais ils sont noirs, alors l’armée américaine préfère enterrer leurs exploits.

Depuis le décès de son frère, en 1943, Maurice, un Creusois, gère la ferme de sa belle-sœur et celle de ses parents, mais il déteste les travaux agricoles. Il appartient à un petit groupe de Résistants et désire s’engager entièrement. Un matin, il part, sans prévenir personne et rejoint le maquis Stoquer. Avec son unité, il intègre le 78e Régiment d’infanterie.

En 1945, une Rochelaise, Néomaye, décide de partir à Royan, où vit sa sœur. Sage-femme, elle veut lui apporter son aide pour son accouchement imminent. Hélas, le 5 janvier 1945, un bombardement allié détruit la ville. Néomaye est une des rares survivantes. Après ce drame, elle danse sur la plage. « Sur le port de la Pallice, tous la surnomment la Tabayot, la folle. » (p. 97) 

Entre 1950 et 1967, des milliers d’Américains étaient installés en France, dans le cadre des missions de l’OTAN. La population était partagée sur leur présence. Pour certains, elle faisait figure de nouvelle occupation, pour d’autres, elle apportait le renouveau, le progrès et relançait l’économie. « Pour les uns, les libérateurs d’hier font figure d’envahisseurs. Pour la majeure partie des autres, les Américains représentent une véritable manne financière, car ils ne sont pas avares. » (p. 14) Corine Valade décrit les relations entre les GI et les Français, parfois, harmonieuses et, parfois, tendues. Je ne savais pas que les Américains étaient restés si longtemps et avaient été si nombreux, sur le sol français. De plus, je n’avais pas conscience qu’ils avaient été rejetés par une partie des autochtones. Ils ont apporté leur culture, en particulier, musicale, ils ont partagé leurs découvertes, par exemple sur le plan médical, leurs boissons, etc., c’est ainsi que la France s’est américanisée.

Willie, après des missions sur différents territoires, est affecté à La Rochelle. A travers ce personnage, l’auteure décrit le racisme dans l’armée américaine. Sous cet angle, elle raconte une part de l’Histoire américaine, en évoquant la ségrégation, la lutte pour les droits civiques, le Klu Klux Klan, Martin Luther King, Malcolm X, etc. Malgré les exactions qu’il connaît, Willie, celui que l’on surnomme « le pianiste fou », croit au « vivre ensemble ». Il espère changer les mentalités par la douceur. Sa tempérance m’a beaucoup touchée, tout comme son envie de prouver ses valeurs par ses actes.

Les thématiques de Danse Néomaye, danse ! sont nombreuses et détaillées : l’existence de faux maquis, la place des femmes, la Résistance, la musique, la ségrégation, le manque de reconnaissance au sujet du rôle des Afro-Américains, dans le Débarquement et dans les conflits, les couples mixtes (nationalités ou couleurs de peau différentes), l’américanisation de l’Europe et sa difficile reconstruction, etc.

Danse Néomaye, danse ! est aussi un magnifique roman dans lequel les émotions explosent. Les personnages sont, terriblement, attachants. Composés de failles, de conviction, d’espérance et de sentiments, ils ne prennent pas toujours les bonnes décisions. Les regrets envahissent leur cœur. Trahisons et actes désespérés côtoient le merveilleux de l’humain. Malgré leurs chagrins, ils sont vivants et tentent de se le prouver à eux-mêmes. L’amour, qu’il soit pour la patriotique, amoureux ou familial, colore toutes les pages.

J’ai eu un immense coup de cœur pour cette fresque historique et sociologique, emplie d’humanité, qui mêle les destins personnels à l’Histoire collective.

Je remercie sincèrement Virginie des Éditions de Borée pour ce service presse.

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