Hors de toi, Sandrine Girard

Hors de toi

Sandrine Girard

Editions Calmann-Lévy

Quatrième de couverture

« Puisqu’ils ne savent pas, puisque l’angoisse te suit partout où tu vas, c’est à toi, jour après jour, souffle après souffle, d’inventer ta survie. »

Alice a cinq ans, six ans, sept ans, onze, quinze, vingt-cinq… Elle vit intensément chaque rencontre, chaque bain de mer, chaque instant. Et la rage bout en elle, une rage compacte qui explose par intermittence quand elle ne la retourne pas contre elle-même.

Ses parents ont divorcé. Ballottée d’un foyer à l’autre, elle endure en apnée la présence de ses beaux-parents: la cruauté d’une belle-mère jalouse, l’alcoolisme d’un beau-père brutal. Nulle part, elle n’est en sécurité.


Ce qu’Alice cache, y compris derrière sa soif de vivre inextinguible, ce sont les violences qu’elle subit au quotidien. Car toutes ces années, Alice se tait.

Entre ombre et lumière, Hors de toi tisse une myriade de souvenirs qui se répondent dans un virtuose jeu d’échos, pour reconstituer au plus près des émotions le tourbillon brûlant d’une mémoire traumatique.

Mon avis

J’essaie d’écrire ma chronique et mes larmes coulent. Je pleure pour Alice et pour la petite fille que j’ai été. Chaque mot qui me vient au sujet d’Alice semble venir de moi, chaque étape que je désire relater du récit paraît être tirée de moi. Aussi, je suis perdue pour trouver un angle, car parler d’Alice, c’est parler de moi. 

Les parents de la petite fille ont divorcé. Son père s’est installé avec une femme odieuse, qui prend un plaisir sadique à faire du mal à sa belle-fille. Par des mots, des coups, assénés discrètement et qui ne laissent pas de marques, ou en brûlant la carte postale qu’Alice a reçue de sa maman, avant même que l’enfant l’ait lue, elle lui montre qu’elle n’est rien. Son père ne réagit pas. A ce sujet, elle m’a rappelé que j’avais de la chance : la femme de mon père est géniale, elle est une amie à mes yeux, elle est même la marraine de ma fille.

Le domicile maternel n’apporte pas la paix. La nuit est source d’angoisse, elle a peur de dormir, de laisser ses pensées l’envahir, d’être vulnérable. Alice est une boule de colère, un cri de rage. Par moments, elle explose. La fragilité de sa mère lui fait « prendre les armes ». Mais souvent, elle se tait. Personne ne voit sa détresse, car elle sourit et profite de chaque instant heureux, ; elle connaît la valeur de chaque bonheur et de chaque émerveillement. Elle est très attachée à son petit frère, qui a sept ans de moins qu’elle, mais elle hait le père de celui-ci. Georges est alcoolique et extrêmement violent. Il est un monstre.

Alors, Alice se réfugie à l’école et craint les vacances. Plus tard, elle se jettera dans l’ivresse du travail. Elle se donne, entièrement, en amitié. Entre êtres fracassés, on se reconnaît. Elle vit chaque rencontre intensément puis se déconnecte, elle rit et elle sursaute, elle s’amuse puis ne supporte plus, etc. Elle a cinq ans, huit ans, douze ans, quatorze ans, vingt-cinq ans, sept ans, dix ans… Chaque fait relaté est introduit par l’indication de son âge, elle navigue entre les années, fait des bonds dans le temps, des retours dans le passé. Le respect de la chronologie n’est pas important, ce qui compte est la teneur de la confidence. Alice espère cet évènement qui fera disparaître la peur de son être, cette angoisse chevillée à son corps, qui se réveille dans des situations, qui sont anodines pour d’autres. Elle vit passionnément et elle pleure en silence. Toutes ses émotions sont exacerbées, dans le beau et dans le laid.

Je me suis tellement projetée et tant assimilée à Alice, que j’ai peur de mélanger mes souvenirs et les siens. Plus jeune, je ne pouvais pas utiliser le « je » pour parler de moi, je disais « elle ». Quand elle se confie, Alice dit « tu ». Est-ce moi ? Est-ce elle ? Le texte est composé de silences et de non-dits et ce sont eux qui dévoilent la vérité. Je les ai entendus et écoutés : je les ai reconnus. Ce roman est d’une justesse extraordinaire et je suis bouleversée par son authenticité et sa finesse. Même si je n’ai pas su m’éclipser, j’espère que mon émotion vous donnera envie de lire Hors de toi. Alors que des larmes de gratitude envers Sandrine Girard jaillissent, je ne sais comment conclure ma chronique. Je ne peux que dire que Hors de toi est un immense coup de cœur.

Je remercie sincèrement Doriane des Éditions Calmann-Lévy pour ce service presse.

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