La maison des mensonges, John Marrs

La maison des mensonges

John Marrs

Éditions City

La vie de Nina est réglée comme un métronome : le matin, elle va travailler à la bibliothèque et le soir elle retrouve sa mère Maggie, avec laquelle elle vit depuis toujours. Nina prépare le repas et les deux femmes dînent paisiblement.

Un quotidien parfaitement banal. Mais un détail jette une ombre au tableau : le pied de Maggie est attaché à une lourde chaîne qui l’empêche d’atteindre la porte de la maison. Et cette chaîne, elle ne la quitte jamais, pas même quand elle dort dans le grenier, parfaitement insonorisé.

Docile, Maggie accepte tout : les privations, les punitions et la solitude. Car ce qu’elle a fait à sa fille, des années auparavant, est impardonnable et elle doit en payer le prix. Mais il y a beaucoup de secrets que Nina ignore et que sa mère n’a pas l’intention de lui révéler. Parce que dans cette maison, la vérité est plus dangereuse que le mensonge…

Depuis sa fenêtre, Maggie observe ses voisins. Dans sa chambre, qu’elle appelle « le nid-de-poule », elle les regarde vivre et constate l’évolution de leur existence. Elle les voit ; elle leur est invisible. Si ce soir, elle dîne avec Nina, sa fille, elle lui confiera les nouvelles du quartier. Cela se produit un soir sur deux.

Nina travaille dans une bibliothèque. En dehors de son travail, elle a peu de liens sociaux. Cette presque quadragénaire habite encore la maison de son enfance, avec sa mère. Sa routine est établie : un soir sur deux, elle mange seule ; l’autre, elle convie Maggie à sa table. Pour cela, elle change l’entrave qui enserre la cheville de cette dernière. Elle lui met celle avec une chaîne plus longue. En effet, depuis deux ans, elle séquestre sa mère dans un grenier, parfaitement insonorisé.

Pendant leurs repas, elle est très vigilante, car malgré sa docilité apparente, Maggie a déjà tenté de s’échapper. Pourtant, celle-ci connaît les raisons de son enfermement ; elle sait que ses actes sont impardonnables et que chaque manquement est suivi de sanctions.

Évidemment, Maggie ne rêve que d’une libération. Pourtant, elle comprend les raisons pour lesquelles sa fille lui en veut tant. De son côté, les liens maternels ne sont pas entièrement rompus.

Le récit alterne entre les deux voix et deux temporalités : le présent est lié à des évènements survenus vingt-cinq ans plus tôt. Nos sentiments, eux, se succèdent de manière anarchique et antagoniste. Notre empathie se déplace au fil des révélations, notre haine circule de Nina à Maggie et de la mère à la fille. Nos suppositions s’opposent, nous accordons notre confiance à l’une puis à l’autre, notre méfiance change de cible, nos déductions nous effarent.

Même si à plusieurs reprises, j’ai eu un pressentiment, quelques pages avant certains renversements, je ne voulais pas y croire et ma stupéfaction n’était pas amoindrie. D’autant plus qu’un détail me faisait douter de moi-même et des protagonistes. L’histoire, au fil des pages, se transformait et une nouvelle intrigue naissait. Évidemment, j’étais happée par ce huis clos au suspense machiavélique et haletant. Mes émotions me perturbaient : je comprenais des faits horribles, me révoltais contre des réactions légitimes, je ne me reconnaissais plus. Le curseur de ma compassion se plaçait de manière surprenante. J’ai, aussi, été scotchée par le final, très éloigné de ce que j’avais anticipé. J’ai adoré La maison des mensonges.

Je remercie sincèrement Éric Poupet pour sa confiance.

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