L’évangile selon Tinder, Thierry Maugenest et Luce Michel

L’évangile selon Tinder

Thierry Maugenest et Luce Michel

Éditions Robert Laffont

Quatrième de couverture

Jeu, like et match !

Mimi69, âge non renseigné. Aime la littérature (sans préciser laquelle), les soirées foot-bière-pizza-rebière, la plongée sous-marine, les balades en forêt, les bars à vin.
Enfin, ça, c’est ce que mon profil dit de moi. (Tout est faux, ou presque.) Mais, dans la vraie vie, j’ai surtout une rédactrice en chef qui, par (perversité) bonté, m’a collé sur le dos LE dossier de l’été: l’amour à l’heure de la rencontre virtuelle. Alors, je like et je matche, je like et je matche, je like…

C’est ainsi qu’Emma M. Lawrence, croyant n’avoir affaire qu’à un énième article à écrire, va s’aventurer dans un labyrinthe amoureux 2.0, où elle croisera la route de Matthieu, Marc, Luc et Jean. À l’issue de ce parcours initiatique, elle se sera forgé sa propre religion.

Mon avis

Emma, divorcée et mère de deux adolescents, est la dernière à apprendre que sa rédactrice en chef lui confie le dossier de l’été ; elle a trois mois pour rédiger un article sur les rencontres en ligne. Ses collègues lui fournissent une liste de sites, mais elle préfère s’adresser à sa meilleure amie pour faire ses premiers pas sur Tinder. Nina l’aide alors à créer un profil attirant et réaliste à la fois. 

C’est ainsi qu’un dimanche soir, Emma, seule dans son salon, étudie les profils que l’application lui propose. « Je ferme les yeux, oubliant un instant la journaliste pour renouer avec la femme en moi. » (p. 39) Et si, son enquête lui permettait de trouver l’amour ? Son cœur palpite lorsqu’elle tente un petit like qui se termine en MATCH. Pendant trois jours, elle attend un message qui ne vient pas. Aussi, elle relance l’application (elle a besoin d’éléments pour son article) et elle découvre qu’elle a reçu un grand nombre de likes. De swipe en like, puis en match, elle se prend au jeu. Échaudée par la rencontre ratée avec son premier MATCH, qui ne s’est plus manifesté, elle se lance et rédige un message, qu’elle aurait dû relire avant d’appuyer sur la touche « envoi ». « Aussitôt le message envoyé, je me rends compte de sa connotation sexuelle. Mais quelle conne !!! » (p. 50)

Après les premières maladresses du début, Emma a ses premiers rendez-vous. Évidemment, les travers ne sont pas révélés dans les profils et elle va de déconvenues en déconvenues. Ce n’est pas grave, cela lui donne de la matière pour son dossier. Hélas, ce n’est pas si simple, car elle n’a pas encore appris à jouer. Elle reste elle-même et elle se retrouve piégée dans des situations qui ne lui conviennent pas. Les rêves de prince charmant et les règles de bienséance l’entravent et l’empêchent de vivre ses propres désirs. Cependant, elle assimile rapidement les codes. Elle s’aperçoit qu’elle devient addict. Elle analyse parfaitement les dérives, mais se laisse emporter par les plaisirs de la consommation. Elle est consciente qu’elle doit arrêter, mais son travail est un prétexte idéal pour aller plus loin. Elle est très lucide, d’autant plus qu’elle réalise des interviews d’utilisateurs de sites de rencontre et que les propos de ces derniers rejoignent ses constatations. Mais la tentation est forte…

L’évangile selon Tinder est un roman truculent. J’ai eu d’innombrables éclats de rire. En effet, même si je n’ai jamais utilisé les sites de rencontres, les relations hommes-femmes constituent l’essence du roman ; il y a les personnes qu’on ne souhaite jamais revoir, celles qui deviennent des amis, celles avec qui on aurait aimé aller plus loin, celles de qui on tombe amoureux. Les idylles sont décryptées sous l’angle des applications, mais l’humain est le centre. Emma est prise dans une spirale. A l’ère du 2.0, son cheminement est accéléré, ses échanges l’ont transformée, pourtant, c’est en elle-même que se cachent les réponses sur qui elle est et sur ses attentes. Elle va à la rencontre d’elle-même.

Je n’avais jamais lu de livres de Thierry Maugenest, alors que j’avais lu trois romans de Luce Michel. En Emma, je n’ai pu m’empêcher de reconnaître une part de son héroïne Lola. Comme elle, elle est indépendante, lucide, pleine d’humour et d’autodérision. J’y ai lu, également, des points communs avec Alice, dans son désir de se connaître et de se comprendre. Zoé est aussi présente : comme elle, Emma concilie son rôle de mère, celui de journaliste et celui de femme. Grâce à la garde alternée, une semaine sur deux, elle est plus l’une que l’autre. Ainsi, un dimanche sur deux, elle retrouve ses amies autour d’un dîner, et elle programme ses rendez-vous, quand ses enfants sont absents. Cependant, son désir est de réunir les différentes facettes de sa vie. Sous son humour ravageur et sous ses airs de femme accomplie, son cœur ne demande qu’à s’emballer pour un homme. Comme toutes les femmes, Emma ne peut pas être mise dans une case. Elle montre la diversité qui nous constitue. Bien sûr, les hommes ne sont pas en reste, leurs profils et leurs attentes sont très variés. Comme dans la vraie vie.

J’ai adoré L’évangile selon Tinder. Le point essentiel est que j’ai ri, à de multiples reprises. L’humour se situe dans les répliques, dans les situations, parfois burlesques et dans le fait que le récit renvoie à la réalité. Cette véracité amuse, mais elle est aussi celle qui interroge et donne une profondeur à l’histoire. Elle est ce qui en fait un roman initiatique humoristique.

Je remercie sincèrement les Editions Robert Laffont pour ce service presse. Merci à Luce Michel pour sa confiance et pour sa dédicace.

Mes chroniques sur les livres de Luce Michel

Lola, sérieux !

Alice, superbe !

Zoé, fantastique !

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