
Les Rêveurs définitifs
Camille de Peretti
Editions Calmann-Lévy
Quatrième de couverture
Emma est traductrice et habite un petit appartement parisien avec Quentin, son fils de quatorze ans.
Lasse de traduire des bluettes sans intérêt, elle rêve d’écrire un grand roman. Au lieu de quoi, rattrapée par des problèmes d’argent, elle est contrainte d’accepter une mission de conseil chez Kiwi, un géant du web qui veut développer un logiciel de traduction infaillible. Mais participer à cette entreprise, n’est-ce pas contribuer à rendre son métier inutile ? Tandis qu’Emma se débat dans ses contradictions, Quentin, lui, vit des aventures extraordinaires dans les jeux vidéo, et s’imagine en gameur de génie. Jusqu’au jour où il est contacté par une mystérieuse organisation qui veut s’attaquer à Kiwi.
Plongés chacun dans une forme de réalité virtuelle qui risque de les éloigner, mère et fils vont se retrouver réunis dans la « vraie vie » par des enjeux qui les dépassent…
Mêlant savamment fiction et réalité, Camille de Peretti convie ses lecteurs à un voyage ludique, qui questionne la puissance de l’imaginaire, du rêve et finalement de la littérature.
Mon avis
Emma est traductrice, essentiellement de romances et de feel-good. Alors qu’elle bataille pour décider si, dans les scènes de séduction, elle doit employer le tutoiement ou le vouvoiement, elle rêve d’écrire son roman. Elle s’imagine sur les plateaux télé, dans les journaux, etc. Elle rêve, mais ne le fait pas. Dans son esprit, les idées s’amorcent, mais ne se concrétisent pas. Dans beaucoup de domaines, elle fonctionne ainsi. Aussi, les papiers administratifs s’amoncellent sur son bureau. Les lettres sont classées par ordre de priorité, dans des pochettes, mais ne sont pas ouvertes. Mais la réalité la rattrape : elle doit payer 5 000 euros et c’est la dernière lettre de relance. Elle n’a pas lu les précédentes, qui l’informaient qu’elle devait changer de statut juridique. Elle doit trouver, urgemment, de l’argent pour régulariser sa situation. Elle accepte alors une mission de conseil au sein de l’entreprise Kiwi.
Le projet de Kiwi est de créer un logiciel de traduction parfait, qui saura capable de transmettre l’essence d’un texte. Alors que ce projet signerait la mort de son métier, Emma, acculée par la dette, y participe. Elle a envie de briller par ses idées, pourtant, elle a conscience du danger que représente l’Intelligence Artificielle pour la littérature. Dans de nombreux domaines, Emma exprime une dualité. Elle rêve du grand amour, mais analyse les relations amoureuses de façon cartésienne. Pour ne pas être abandonnée, elle part. Pendant qu’Emma se débat entre ses envies contradictoires, à quelques pas du salon, son fils Quentin, un adolescent de quatorze ans, réalise ses fantasmes. Sur une plateforme de jeux, il aborde la fille qu’il n’ose pas aborder dans la vie réelle. Il a, également, un grand projet : gamer chevronné, il pense que les machines peuvent prendre le pouvoir. Une mystérieuse organisation lui propose d’agir.
Les rêveries d’Emma sont doubles, elles aussi. Elles les appellent des « traversées ». Je connaissais ce phénomène, sans pouvoir le nommer. Dernièrement, j’expliquais à mon mari que j’avais la sensation que mon cerveau n’était jamais au repos. À partir d’un mot ou d’une situation, l’enchaînement de mes pensées projette des scénarios que j’ajuste, par exemple, si l’image est dramatique. J’efface et je reprends avec des éléments positifs, puis je dévie sur d’autres sujets. J’avais été surprise quand mon époux m’avait dit qu’il ne fonctionnait pas ainsi.😀 Aussi, j’ai aimé pénétrer dans l’imagination d’Emma, quand elle est assaillie d’images. Cet enchevêtrement me l’a rendue attachante.
J’ai, aussi, apprécié la description, sarcastique et humoristique, de sa profession. J’ai été sensible à son amour de la littérature et au débat intérieur que déclenche sa mission. D’autres sujets affleurent autour des thèmes principaux : l’amitié, les relations (parentales, amicales, amoureuses, professionnelles) à l’époque de la technologie, les mutations du monde que nous connaissons, l’adolescence, etc. Bien que le roman traite des relations humaines et du mélange de rêves et de réalité qui nous composent, la multiplicité des thèmes m’a un peu perdue. Cette réflexion sur l’impact du virtuel dans le réel provoque une introspection, mais je n’avais pas envie de quitter le monde intérieur que l’auteure propose pendant une grande partie du roman. Mes attentes n’ont pas évolué au même rythme que l’histoire, aussi, j’ai eu un goût d’inachevé à la fin, j’ai eu la sensation d’être en décalage avec la conclusion. Cependant, j’ai beaucoup aimé Les Rêveurs définitifs.
Je remercie sincèrement Doriane des Éditions Calmann-Lévy pour ce service presse.