
Tu ne seras plus mon frère
Christian Blanchard
Éditions Belfond
Quatrième de couverture
« Tu ne seras plus mon frère mais un ennemi à éliminer. »
2011, Syrie. Kasswara et Kamar, deux frères franco-syriens auparavant très unis, découvrent que l’amour fraternel n’est parfois pas assez fort. Quand le printemps arabe éclate, leurs divergences prennent le dessus. L’un rejoint la rébellion, l’autre demeure un fervent défenseur du régime de Bachar el-Assad.
Il n’y a plus de frères maintenant mais deux camps.
Tu ne seras plus mon frère mais un ennemi à éliminer.
2019, France. Florence Dutertre, assistante sociale, supervise le retour des « lionceaux du califat ». Ces enfants de djihadistes français ont grandi dans des camps syriens sous le commandement de Daech. Bombes à retardement ou jeunes innocents ? La question ne semble pas se poser pour le sniper qui les exécute un par un à leur arrivée sur le territoire. Terriblement choquée, Florence est pourtant prête à tout pour sauver ces enfants auxquels on a appris à compter avec des grenades…
Roman sombre et engagé, Tu ne seras plus mon frère nous plonge dans une Syrie déchirée où les liens du sang définissent les cibles à abattre et décrit, avec la puissance de son intrigue, l’impossible retour des enfants de combattants.
Christian Blanchard vit en Bretagne. Il a travaillé durant vingt-cinq ans au sein d’une institution publique avant de se consacrer à l’écriture. Il est notamment l’auteur d’Iboga (Belfond, 2018), prix du Meilleur polar 2020 des lecteurs Points, de Seul avec la nuit (Belfond, 2019) et de Angkar (Belfond, 2020), prix du Roman noir 2020 des bibliothèques et médiathèques de Grand Cognac.
Mon avis
Syrie, 2011. Les chaînes gouvernementales syriennes ne parlent pas des débuts du « printemps arabe », que Kasswara observe, sur les réseaux sociaux. Son frère, Kamar, s’engage alors dans l’armée de Bachar el-Assad. Quelques mois plus tard, Kasswara reçoit une lettre de l’armée syrienne lui ordonnant de la rejoindre. Il déserte et rallie les forces de l’Armée Syrienne Libre. Aux yeux de sa mère, syrienne et musulmane, il est un traître. Son père, français, est fier de lui. Les deux frères combattent l’un contre l’autre. Les liens du sang sont effacés, remplacés par la haine.
Par la voix de Kasswara, Christian Blanchard retrace les évènements tragiques de Syrie, de manière chronologique. Il rappelle les actes de Bachar el-Assad contre son peuple, les deux camps du pays qui se battent l’un contre l’autre, la répression du régime contre les opposants, l’émergence de Daesh, la position des pays occidentaux, le rôle trouble de la Russie, etc. Ces faits qui sont, souvent, difficiles à appréhender à travers les images des actualités, sont explicités et rappelés par l’auteur.
Kamar et Kasswara savent qu’ils s’affronteront, lors d’un combat. Tous deux sont tireurs d’élite, tous deux pensent être du bon côté. La cause dépasse la complicité de l’enfance.
Seine-Saint-Denis, septembre 2019. Florence est assistante sociale. Sa mission est d’évaluer le risque que représentent les enfants de djihadistes, de retour en France. Le garçon avec qui elle s’entretient s’appelle Youssef. Il avait six ans, en 2011, quand sa mère a rejoint Daech, en l’emmenant. Cette dernière a été tuée en Syrie. Les grands-parents maternels désirent que leur petit-fils vive avec eux, mais celui-ci est assassiné par un sniper, sous les yeux de Florence. C’est le troisième enfant de djihadistes qui meurt de cette manière. Qui est ce tueur qui exécute les lionceaux du califat ?
Le désendoctrinement est-il encore possible ? Ces petits, sont-ils encore des enfants ou des bombes à retardement ? Le sujet est terriblement sensible. Ils sont jeunes, mais ils ont appris à tuer. Ils ont grandi avec l’idée que l’objectif de leur vie devait être de supprimer les « mécréants ». Cependant, ils sont aussi des enfants.
Alors que Daech a perdu des territoires, les actes terroristes en son nom se multiplient sur le territoire européen. Le roman noir de Christian Blanchard nous force à nous interroger sur le retour de Syrie de ceux qui ont été, dès leur enfance, formatés par les djihadistes. Il ne prétend pas apporter la solution, mais ouvre de nombreuses questions en nous : l’âge des enfants/les dangers pour les nôtres.
Il montre aussi que l’attitude des pays puissants est ambiguë et même si on le sait pertinemment, cela reste glaçant de lire combien la menace est proche de nous. Nous connaissons un grand nombre d’évènements évoqués dans Tu ne seras plus mon frère, cependant, la manière de les traiter les éclaire. Kasswara est au cœur des conflits, il décrit les tirs et ses sentiments qui évoluent à chaque mort dont il est responsable. Il se confie, également, au sujet de sa famille. Alors que ses parents aimeraient que la division n’éclate pas leur famille, Kasswara et Kamar savent que le point de non-retour est atteint.
Tu ne seras plus mon frère est un roman qui remue. Le sujet nous touche de près, il nous renvoie à l’horreur qui nous a meurtris et nous menace toujours. Il est impossible de prendre du recul en le lisant. De plus, il nous oblige à nous questionner, sans que l’on trouve de réponses, ce qui montre à quel point la situation de notre monde est inquiétante. C’est un livre puissant.
Je remercie sincèrement les Éditions Belfond et NetGalleyFrance pour ce service presse.