Five Points, Eric Yung

Five Points

Eric Yung

Editions de Borée

Quatrième de couverture

Stéphanie Saint-Clair a 26 ans lorsqu’elle débarque à New York et s’installe dans le quartier le plus misérable de la ville : Harlem. Quelques années plus tard, elle devient « la princesse », « la big boss » des loteries clandestines et fait fortune dans le crime. A travers les aventures de son héroïne, Éric Yung nous entraine dans les bas-fonds de New-York à une époque où, à peine sortie de la prohibition, les familles italiennes, après avoir détrôné les clans et les gangs Irlandais, juifs et Hollandais, ont érigé le pouvoir mafieux, à travers le syndicat du crime, en une authentique institution, organisation violente et implacable régissant les règles et lois du « milieu ». C’est dans cette société que « La princesse », détentrice d’un secret personnel qui nourrit tout le roman, deviendra la première dame d’un quartier à la fois embrasé par les émeutes et régénéré par un formidable mouvement d’artistes et d’intellectuels qui contribuera à ce qui a été appelé « La renaissance de Harlem ».

Mon avis

Five Points est un roman qui s’inspire de la vie de Stéphanie Saint-Clair. Originaire de la Martinique, elle est arrivée à New-York, en octobre 1924, à l’âge de vingt-six ans. Celle qui est devenue la Princesse de Harlem, ce terme signifiant qu’elle était à la tête d’un gang mafieux, se remémore son arrivée à Ellis Island. Un escalier pouvait changer son destin. On lui a demandé d’emprunter celui qui lui offrit le sésame américain. Elle a alors fait son apprentissage auprès de voyous irlandais et s’est, très vite, imposée comme chef de bande. En quelques semaines, elle est parvenue à réunir une vingtaine d’hommes fidèles et, en quelques années, elle a modifié le paysage mafieux.

Dans un avertissement, Éric Yung indique qu’il a été forcé d’imaginer la vie de Stéphanie Saint-Clair. En effet, peu de documents existent à son sujet, alors que son parcours est surprenant. Elle a côtoyé des parrains, tels que Lucky Luciano et Frank Costello. Elle a régné sur Harlem. Rien ne la prédestinait à cette fonction : elle était une femme, Française, noire, elle était autant respectée par le milieu intellectuel que par les Harlémites, de toutes conditions sociales. Alors qu’elle exploitait le milieu clandestin des loteries, qu’elle était reconnue comme une figure importante du crime, elle œuvrait, également, pour la reconnaissance des droits des noirs, elle voulait combattre la ségrégation et elle se battait pour les droits des femmes.

A travers Stéphanie, la dualité humaine s’exprime. Une partie de l’argent qu’elle avait gagné, illégalement, était donnée à des œuvres sociales. Elle a aidé les habitants des quartiers modestes, à condition qu’ils soient déterminés à s’en sortir, grâce à un travail honnête. Elle commanditait des exécutions, mais se montrait fragile et sensible, dans d’autres circonstances. Elle supprimait ceux qui sont sur son chemin, mais elle était très fidèle à ceux qui lui étaient dévoués. J’ai été fascinée par cette ambivalence et par ce qu’elle a provoqué en moi. Alors que la Princesse dominait un milieu, dans lequel je n’aurais pas aimé évoluer et qui s’oppose à ma vision de la société, je me suis attachée à elle et j’ai tremblé pour elle. « Acceptez mon offre, madame. J’insiste. Votre vie m’est précieuse » (p. 207) : cette menace prononcée, calmement, par un grand patron de la mafia est glaçante.

La torture que Stéphanie a subie par des membres du Klu Klux Klan a certainement influencé son implication dans la lutte pour l’égalité entre noirs et blancs. Cet événement effroyable est un fait réel. Ensuite, l’auteur a imaginé, à partir de quelques anecdotes rapportées par des journaux américains, l’histoire de cette femme qui a pris les rênes d’un milieu d’hommes. Il décrit l’atmosphère des rues de Five Points, dans lesquelles, pendant les décennies 1920 et 1930, la pègre faisait régner la terreur. La plongée dans les milieux interlopes de New-York est passionnante et provoque le frisson. Cependant, la noirceur est atténuée par la personnalité de Stéphanie et ses questionnements. Sa sensibilité s’exprime dans des lettres qu’elle écrivait à un destinataire dont nous ignorons l’identité. Elle n’envoyait pas les courriers, qu’elle conservait dans un vieux coffre, et qui constituent un Fil d’Ariane. Le secret qui les entoure est dévoilé à la fin du roman et éclaire, de manière différente, certains passages.

Five Points est un roman captivant sur la mafia new-yorkaise et la diversification de ses activités, à la fin de la prohibition. J’adore quand les personnages créent un malaise en moi, en raison des sentiments partagés que je ressens à leur encontre.

Je remercie sincèrement Virginie des Éditions de Borée pour ce service presse.

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