
Florida
Olivier Bourdeaut
Éditions Finitude
Quatrième de couverture
« Ma mère s’emmerdait, elle m’a transformée en poupée. Elle a joué avec sa poupée pendant quelques années et la poupée en a eu assez. Elle s’est vengée. »
Mon avis
Elizabeth est une poupée modelée par sa mère. A l’âge de sept ans, elle participe à son premier concours de beauté : elle gagne, pour son plus grand malheur. Celle que la petite fille surnomme la Reine-Mère n’a plus qu’une obsession : réitérer l’exploit. Pour cela, elle est prête à tout faire subir au corps de sa fille et n’a plus de limite : épilation, faux cils, répétitions après les devoirs, etc. La mère ne vit que pour les samedis, l’école ne doit pas empiéter sur ce qui compte vraiment pour elle : les concours de mini-Miss. Elle dit à sa fille qu’elle « est très belle, et pas trop bête ». Mais Elizabeth termine toujours deuxième ou troisième, aussi, les artifices sont multipliés. La pauvre petite ne peut espérer aucune aide de son père, qu’elle appelle le Valet. Celui-ci est bien heureux d’avoir sa tranquillité.
A douze ans, Elizabeth dit « stop », mais elle n’est pas entendue. Aussi, elle prend sa mère à son propre jeu. Après un esclandre sur scène, elle décide d’utiliser son corps pour dire « non ». Elle le détruit jusqu’à le métamorphoser. Les sucreries deviennent ses alliées. Un jour, elle comprend que c’est, aussi à elle, qu’elle fait du mal et elle décide de se réapproprier son apparence. Hélas, une fois encore, elle vit une désillusion à ce sujet. C’est alors que son corps devient, selon elle, un vecteur de vengeance. Elle se consacre au body-building, jusqu’à l’obsession. Elle n’a pas conscience d’être instrumentalisée.
Le corps d’Elizabeth a été le lien entre sa mère et elle, ensuite il est devenu objet de rejet, puis de désir et enfin de vengeance. La première partie m’a beaucoup touchée. J’ai eu mal pour cette petite fille, qui ne peut pas vivre son enfance et qui est utilisée par celle qui est censée la protéger. Lors des passages, pendant lesquels elle raconte de quelle manière elle a modelé son corps, j’ai un peu moins aimé la narration. Cependant, j’ai été sensible aux messages. Elizabeth se trompe elle-même, elle a la sensation de maîtriser sa vie. Le fond m’a plu, d’autant plus qu’il prépare à la chute, que j’ai beaucoup aimée. Ce roman égratigne, il est rempli de cynisme et je n’avais qu’une envie, c’était que la petite Elizabeth puisse enfin éclore, qu’elle s’aime pour ce qu’elle est à l’intérieur, et cesse son combat avec son enveloppe extérieure.
L’an dernier, j’avais lu En attendant Bojangles. Je ne l’avais pas chroniqué, car je n’avais pas réussi à analyser mon ressenti. Je l’avais bien aimé, mais un détail de la fin m’avait refroidie. Je n’ai pas cette sensation à la lecture de Florida, au contraire, j’ai adoré cette fin… électrique.
Je remercie sincèrement l’Agence la Bande et les Éditions Finitude pour ce service presse.
Un commentaire