
Les évasions particulières
Véronique Olmi
Éditions Albin Michel
Quatrième de couverture
Elles sont trois sœurs, nées dans une famille catholique modeste à Aix-en-Provence. Sabine, l’aînée, rêve d’une vie d’artiste à Paris ; Hélène, la cadette, grandit entre son oncle et sa tante, des bourgeois de Neuilly-sur-Seine, et ses parents, des gens simples ; Mariette, la benjamine, apprend les secrets et les silences d’un monde éblouissant et cruel.
En 1970, dans cette société française qui change, où les femmes s’émancipent tandis que les hommes perdent leurs repères, les trois sœurs vont, chacune à sa façon, trouver comment vivre une vie à soi, une vie forte, loin de la morale, de l’éducation ou de la religion de l’enfance.
Cette saga familiale, qui nous entraîne de l’après Mai 68 à la grande nuit du 10 Mai 1981, est tout autant une déambulation tendre et tragique dans ce siècle que la chronique d’une époque où les consciences s’éveillent au bouleversement du monde et annoncent le chaos à venir.
Il fallait le talent de l’auteure de Bakhita pour en saisir le souffle épique et visionnaire, et la justesse intime.
Mon avis
Cette saga familiale est une photographie de la France de 1970 à 1981. Elles sont trois sœurs. Au début des années 70, Hélène a onze ans. Sa vie est divisée entre deux mondes : sa famille, de condition modeste, à Aix-en-Provence, et celle, aisée, de son oncle, à Neuilly-sur-Seine. Elle est la seule des trois enfants à se partager ainsi. Sabine a quatorze ans et pendant très longtemps, elle cherchera sa place, dans la société. Elle est persuadée que c’est dans la capitale qu’elle existera. La petite dernière, Mariette, est de santé fragile. Elle a un grand écart d’âge avec ses aînées.
Chacune des filles traverse cette décennie, en fonction de son âge, de sa place dans la fratrie, de sa personnalité et du rôle attribué, inconsciemment, par les parents. Véronique Olmi montre les attentes des filles Malivieri, leur appréhension et leur compréhension des évènements qui ont fait basculer la France dans une nouvelle ère. A la fiction, elle mêle les faits historiques qui ont fait avancer la société française. L’émancipation de la femme tient une place essentielle. L’auteure retranscrit les combats de Gisèle Halimi, de Simone de Beauvoir et de Simone Veil. Quand son père, Bruno, appelle cette dernière : « la mère Veil », Mariette entend « la merveille ». Bruno est un peu perdu, dans ce monde qui évolue. Sa femme veut travailler, ouvrir un compte en banque, maintenant que la loi le permet. Ses filles sont majeures, à dix-huit ans. Cet homme fait de son mieux, mais il est un peu déboussolé.
Sabine, aussi, est un peu perdue. Elle rêve de liberté et de succès. Son rêve est de devenir actrice. Sans en avoir conscience, lorsqu’elle pense se libérer des chaînes de la société, elle se menotte elle-même, dans ses relations aux hommes. J’ai eu envie de protéger Mariette, qui, par sa place de seul enfant encore à la maison, est dépositaire de secrets qui lui pèsent. Mais celle à qui je me suis le plus attachée est Hélène. Elle est déchirée entre deux fidélités, deux mondes : elle a une vie compartimentée. Je me suis sentie très proche d’elle, en raison de ses prises de position pour la cause animale. Je suis révoltée que certains des combats que Brigitte Bardot menait, dans les années 70, et que l’auteure relate, soient toujours d’actualité. J’ai été effarée de lire qu’à cette époque, la possibilité de remplacer la vivisection par l’utilisation de cellules souches était déjà connue et qu’en 2020, cette possibilité est encore peu exploitée.
Ce roman est d’une richesse exceptionnelle. Il est une photographie de cette époque qui a construit le monde d’aujourd’hui. En mêlant les existences des membres de la famille Malivieri au contexte politique et sociétal, Véronique Olmi montre de quelle manière le monde extérieur agit sur la dynamique familiale et comment cette dernière influe sur la société.
Conclusion
Au bout de trois pages, je savais que j’allais adorer Les évasions particulières. J’ai eu un coup de foudre pour ce roman, à la fois, tendre et bouillonnant, comme semblait l’être l’époque. C’est une fresque magistrale qui dépeint tous les aspects de ces années charnières de l’après Mai 68 jusqu’au soir de l’élection de François Mitterand, le 10 mai 1981.
Je remercie sincèrement les Éditions Albin Michel pour ce service presse.
J’avais été bouleversée par Bakhita, ce billet donne envie de découvrir celui-ci!
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