La traversée de nos rêves
Andreea Badea,
Éditions Mazarine
Quatrième de couverture
Bucarest, été 1986. La Roumanie de Ceaucescu n’a jamais semblé aussi proche de l’implosion. Censure, arrestations arbitraires, privations…La dictature resserre son étau, et chaque jour les opposants au régime s’organisent. Parmi les étudiants, la ferveur est à son comble : il faut lutter, sans alternative.
Avides de liberté plus que de révolution, Andrei et Silvia ont aussitôt noué une amitié instinctive, évidente. Reste qu’ils ont le sentiment d’avoir 20 ans au mauvais endroit, au mauvais moment : musicien prodige et fantasque, lui doit vivre ses amours clandestinement pour éviter la prison. Ténébreuse, passionnée, elle est major de sa promotion dans l’indifférence totale de ses parents, dont l’ambition est de la marier – de préférence à un communiste bien né. Quand le régime se durcit au point de briser leurs rêves, Andrei et Sylvia décident donc de fuir vers l’Ouest. Qu’importent la peur et le danger, tant qu’ils sont ensemble. Mais la tragédie de l’Histoire les sépare aussitôt, et chacun se retrouve seul, face à un futur incertain…
Les âmes soeurs finissent-elles par se retrouver quand elles savent attendre ?
Mon avis
Le début du livre m’a remémoré des images qui m’ont énormément marquée. Fin 1989, j’allais sur mes treize ans. Je me souviens avoir vu défiler en boucle, des images de l’exécution du dictateur Caeucescu et de son épouse. Sans en comprendre complètement l’importance, je n’ai pas oublié ces images. Pourtant, La traversée de nos rêves m’a révélé que j’en avais créé certaines, que tout n’avait pas été montré à la télévision, contrairement au souvenir que j’en ai gardé.
Andrei et Silvia sont étudiants sous la dictature roumaine. Or, ils rêvent de liberté. Alors que le jeune homme pense qu’il trouvera cette dernière lorsque le pays se révoltera, la jeune fille n’a pas d’espoir pour leur génération et pense qu’ils ne peuvent être libres qu’en fuyant.
A travers leur histoire, Andreea Badea raconte le régime totalitaire. Elle dépeint les lois natalité et anti-avortement, les orphelinats. C’est glaçant. La description des centres de transit dans lesquels se retrouvent les personnes qui tentent de rejoindre l’Occident, lorsqu’elles sont arrêtées, m’a sidérée. Les informations sur la Roumanie ne quitteront pas mon esprit. En effet, distillées au cœur du roman, elles sont intégrées dans le récit. J’ai beaucoup apprécié les notes, en bas de page, qui permettent de comprendre le contexte politique.
Les rêves d’Andrei et de Silvia témoignent également des différences entre les générations. Alors qu’elle est major de sa promotion, les parents de la jeune femme lui reprochent son ambition et n’acceptent pas qu’elle veuille changer de classe sociale. L’amitié est également un thème très présent, tout comme l’amour et la passion. Ce roman questionne sur la frontière entre l’amour et l’amitié et celles entre l’attirance physique et le véritable amour.
J’ai adoré La traversée de nos rêves. Ce roman est empreint d’une très grande sensibilité. Il y a beaucoup de douceur dans la plume d’Andreea Badea, même lorsqu’elle évoque des sujets très durs. Et pourtant, lorsque nos héros vivent certaines épreuves, la narration fait que je les ai ressenties. J’étais au bord des larmes. Je me suis énormément attachée à Andrei et Silvia, j’ai eu la sensation de faire partie de leurs intimes, leurs rêves sont devenus miens.
Ce livre traduit les choix douloureux pour pouvoir exister, il raconte l’exil, il exprime le chemin sinueux pour accéder à ses rêves et les sacrifices qui en découlent. Mais il symbolise surtout l’espoir et l’envie de vivre ses désirs. Enfin, c’est une magnifique histoire d’humanité et de sentiments.
La traversée de nos rêves est un superbe premier roman.
Je remercie sincèrement Marie-Félicia des Editions Mazarine pour ce service presse.